Arrêt du Projet de Centre Intergénérationnel
par Carole Braéckman
Et voici la lettre qui marque l’arrêt du projet de Centre Intergénérationnel, ou plutôt sa mise en sommeil...
Et avec votre aide, sa germination...
Bonjour,
J’arrête le projet de Centre intergénérationnel. Pour lire un peu quelles étaient les ambitions et finalités du projet
Plusieurs points à tricoter, pour donner sens à cet arrêt.
Ma grande amie, Anne-Françoise, me disait souvent : « C’est un beau projet, mais je n’y vois pas ta place. ». Ce à quoi je répondais : « Moi non plus ! Je le monte, j’y consacre quelques années de ma vie, et dès que ça tourne ! j’arrête ». Je n’envisageais pas d’en être la directrice.
Pour monter un projet, il faut des idées, de la ténacité, une force de conviction, un certain élan fédérateur. J’ai tout cela.
Une fois le premier centre créé, j’aurais continué ma marche pour en implanter d’autres sur le même modèle. Car, c’est pour moi une idée qui a de la valeur, et qui pourrait remplacer nos tristes maisons pour vieux, et certaines de nos solutions pour jeunes. Et qui permettrait à des personnes de donner sens à leur vie, et de servir (tant de personnes ont tant d’amour à donner, et vivent la solitude !)
Puis, j’aurais repris mes activités, ma plume entre autres, et aurais, de temps en temps, réalisé une tournée des établissements.
Ma place dans le projet, c’était l’initiative, la marche en avant jusqu’à la réalisation.
Pour avoir, il y a vingt ans, travaillé en tant que cadre, mais aussi déléguée du personnel, dans une association dont les financements posaient problème ! je savais pertinemment ce vers quoi je me dirigeais. Le monde des politiques, le monde des financeurs, je le connais ! Ce n’était pas la partie de l’affaire qui me séduisait le plus, mais j’étais prête à en passer par là.
En décembre, je lance l’idée. Première réunion le 11 février. Entre deux escapades écriture. Je mets en route les choses, les recherches (beaucoup d’entre vous s’en chargent !), les contacts… Je rencontre déjà quelques personnes…
Je pars au Népal. Où mon amie Anne-Françoise, qui m’y avait rejointe, meurt brutalement. Je suis secouée à l’âme ! Je reprends encore la mort en face : la mort/la vie ! Qu’est-ce que je fais de ma vie ? où suis-je le plus utile ? quelles sont mes priorités ? etc. etc.
De retour, je programme une Assemblée générale. Puis me rends à deux rendez-vous.
Le premier, celui d’une jolie et tendre structure atypique, qui, la mort dans l’âme, renonce à un très beau travail de vingt ans d’accueil de personnes différentes. Le second, deux administratives, un peu sur la réserve. Nous comprenons très nettement que nous débordons généreusement des cadres.
Ouvrir un établissement pour un type de public n’est pas aisé. Ouvrir un établissement en mêlant les publics, c’est pire !
De plus, les tutelles viennent de changer. Auparavant, on soumettait un projet, et une commission statuait dessus pour donner l’agrément. Depuis peu, il y a des enquêtes de besoin : il manque un établissement pour psychotiques par exemple, et un appel d’offre est lancé.
Vous comprendrez vite que la place pour l’originalité n’est tout bonnement même pas envisagée !
Une brève réflexion avec mon accompagnatrice, puis avec le bureau de l’association : on arrête !
J’ai beaucoup mieux à faire de mon temps, et de mon énergie, que de me battre, contre des moulins ! Coucou Don Quichotte ! Et en plus, j’entraînais beaucoup de personnes dans cette aventure hasardeuse. Il vaut mieux envisager de clore l’aventure avant qu’elle ne fasse trop de bobos.
Je continue à penser que mon projet est beau, humain, tendre…
Qu’il donne aux personnes âgées la possibilité de fermer pour la dernière fois la porte de leur maison ou de leur appartement, non pas la nuque basse, mais avec la joie de donner un sens à leur fin de vie : transmettre et aimer ! Rien que cela !
Qu’il donne aux jeunes une occasion de voir la vieillesse, la mort, et donc la vie ! depuis une place essentielle, celle du coeur !
Qu’il donne à des adultes, l’occasion d’offrir tout cet amour qui dort, chagrin, en elles/eux.
Mais le projet n’est pas mort ! Il est au repos. Il a germé et essaimé dans des milliers de direction.
Il mûrit au sein des coeurs. Quelqu’un(e), un jour, va le reprendre.
Demain, peut-être, ou dans dix ans, vingt ans... Peut-être que nous ne le verrons pas de notre vivant. Mais nous avons fait les semailles ! Et je souffle dessus avec tout mon amour.
Certain(e)s d’entre vous sont déçu(e)s .Et même au-delà… Je le sais.
Et j’en suis navrée. Vraiment.
Du fond du coeur, je vous présente mes excuses pour cette société qui n’est pas mûre. Pas encore.
Une amie albanaise me disait qu’à cinquante ans, la première fois qu’elle était entrée, en France, dans une maison pour vieux et vieilles (une trentaine de résident(e)s), elle s’était mise à pleurer.
Ici, en France, à part quand on est touché(e) personnellement, qui pleure encore ?
Il faut laisser tout un pays, un continent, reprendre contact avec sa sensibilité, son amour.
J’ai, personnellement, d’autres biais pour avancer dans cette direction, et je vais de nouveau m’y consacrer.
Je vous remercie de ce bout de route en commun, de votre engagement. Continuons les semailles !
Carole Braéckman.
© Carole Braéckman – www.lhibiscus.fr – juin 2011
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